Blog d'humeurs,
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je préfère le penser... à mon image :
complexe, éclectique, et forcément fait d'un peu de tout.

mardi 5 août 2014

Egalité hommes-femmes, mixité, abcd ???

Je viens de "tomber" sur deux articles à propos de la loi sur l'égalité hommes-femmes et l'une des "mesures-phares", la réforme du congé parental. Et je suis atterrée. Ni plus, ni moins.

Alors il y a un truc marrant, et j'ai vraiment hâte de voir ça. Comment madame Vallaud-Belkacem entend-elle convaincre les filles d'embrasser la carrière de marin-pêcheur, par exemple ? L'article le dit lui-même :
Mais lorsqu’on considère que sur les 87 familles de métiers, seulement 12% sont mixtes dans notre pays, on ne peut que saluer l’effort. Aujourd’hui, 3% des marins pêcheurs sont des femmes. Et pour motiver les petites filles à avoir envie de se lever à 3 heures du matin pour enfiler imper et bottes de pluie, filer sur un bateau dans la nuit noire et épingler des rascasses, la mixité professionnelle sera encouragée à l’école dès le plus jeune âge, afin de rendre attractifs et accessibles des métiers qui aujourd’hui rebuteraient n’importe quelle adolescente.
Je sens que ça va être coton pour les adultes. Vous imaginez ça ? Imaginez une mère de famille marin-pêcheur, elle vient d'avoir un bébé, qui ne fera ses nuits que dans quelques mois, et est obligée de reprendre son travail parce que c'est ce travail qui fait vivre la famille (pauvrement, à cause des dettes contractées pour acheter le bateau dont elle a besoin pour pêcher, mais les fait vivre quand même). C'est un métier difficile, physique, dangereux, et où il faut être bien réveillé, même à trois heures du matin, si on veut être sûr de ne pas louper les balises en mer et sortir, puis rentrer, sereinement, au port. Blague à part, je pense sincèrement que si seulement 3% des marins pêcheurs sont des femmes, c'est tout simplement parce que ça n'intéresse pas beaucoup de femmes de faire ce métier. Qui plus est, de nombreux marins pêcheurs (hommes et femmes confondus d'ailleurs) vivent très mal de leur métier et se posent régulièrement la question de s'arrêter... Donc, oui, seulement 3% des marins pêcheurs sont des femmes, mais est-ce réellement un problème ? Le métier de marin pêcheur est un métier dur, exigeant, et que l'on promeuve ou non la mixité professionnelle ne changera rien du tout à la dureté de ce métier... et au fait que de toute façon, la ressource se fait rare et que la concurrence avec les pêcheurs espagnols est de plus en plus rude, soit dit en passant. Mais moi, je dis ça, je ne dis rien, hein...

En fait, ce qui me turlupine beaucoup dans ces deux lois, ou plutôt dans ces lois sur l'égalité entre hommes et femmes, c'est que justement, elles sont basées sur des faits erronés. Ou plutôt sur la confusion de termes. Un homme et une femme, biologiquement, sont différents et complémentaires. Personnellement, je n'y ai jamais vu un obstacle mais bien une chance. Quand mon mari a la force physique pour déplacer une porte en bois massif, j'ai la capacité de brancher correctement le lecteur DVD (bon d'accord, ça, bon nombre d'hommes savent le faire et mon mari en ferait sûrement partie s'il prenait le temps d'apprendre, mais comme ce n'est pas son truc, ben c'est moi qui le fait, tout simplement). Quand il a l'endurance nécessaire pour poncer les planchers, j'ai la patience nécessaire pour supporter les cris des enfants en vacances et trouver des solutions pour qu'ils ne se tapent pas dessus à longueur de journée. Ce ne sont que quelques exemples, mais de mon côté, je ne me sens absolument pas atteinte dans ma dignité ou dans mes droits du fait que je ne peux pas porter des portes en bois massif ou poncer un plancher une matinée durant. Au contraire. J'admire que mon mari puisse le faire, mais je ne l'envie pas, parce que j'estime que nous n'avons pas besoin de faire tous les deux la même chose, mais de faire tous les deux des choses différentes pour que tout puisse être fait (des travaux à la cuisine, en passant par le soin aux enfants, le paiement des factures ou le repassage, par exemple). Or, dans le discours ambiant, on a vraiment l'impression que si une femme ne peut pas faire quelque chose comme un homme, alors elle vaut moins que l'homme. Et que donc, il faut que les femmes puissent faire les mêmes choses que les hommes parce que sinon, elles sont discriminées ou je ne sais quoi. On confond donc plusieurs choses, là. Égalité ne veut plus rien dire aujourd'hui. Parce qu'on confond cette notion avec celle d'équité, qui est (de mémoire), le fait de traiter les individus de la manière la plus juste et impartiale. Donc si on prend le cas d'un homme et d'une femme qui ont un bébé, quelle doit être la durée du congé maternité et du congé paternité ? La même durée parce que ce sont les parents du même bébé ? Faut-il tenir compte du fait que c'est (jusqu'à présent) la mère qui accouche et non pas le père ? Donc est-ce équitable de donner un congé de plusieurs semaines à la mère et seulement 11 jours au père ? Bien sûr que c'est juste ! Cela va de soi, me direz-vous. Parce qu'en faisant de la sorte, on ne pénalise pas la mère qui a vécu les 9 mois de la grossesse puis l'accouchement dans son corps, ce qui n'est pas le cas du père, qui n'a vécu cette grossesse que de l'extérieur (même s'il a été aux petits soins pour sa femme, ce n'est pas lui qui a eu les maux de dos, les nausées et autres joyeusetés de la grossesse dues au bouleversement hormonal). Donc on peut regarder cette question de la durée du congé maternité/paternité sous l'angle de l'équité (réparer une différence en accordant des droits et des avantages à l'un des deux) ou sous l'angle de l'égalité (sur le mode "c'est pas juste, moi aussi je voudrais être en congé maternité mais je suis un homme, je suis donc discriminé !"). L'un est intelligent car il pallie une différence fondamentale entre les deux personnes et l'autre est particulièrement débile parce que la situation de l'homme et celle de la femme, dans le cas d'une naissance, ne sont pas du tout comparables en termes d'impacts sur la santé.

En fait, je crois bien qu'on veut mettre la notion d'égalité à toutes les sauces et que, du coup, on en vient à confondre égalité et identité (c'est-à-dire même, identique, pareil). Et du coup, le glissement est assez rapide et simple à faire : égaux en droits, l'homme et la femme sont donc "pareils", identiques. Et hop. Et c'est faux. Totalement faux. Un homme et une femme, je le redis ici, ce n'est pas pareil. Un homme et une femme sont complémentaires, tout simplement. Différents, mais riches de leurs différences. Que mon mari soit plus fort que moi physiquement n'enlève rien à ma dignité. Et qu'il travaille dans les vignes ne m'empêche aucunement de m'épanouir dans mon métier de documentaliste ! Je n'ai pas du tout envie de prendre sa place (j'en serais bien incapable !), tout comme lui ne verrait aucun intérêt dans mon métier... Je viens de me relire et je me dis que, franchement, on est tombés bien bas dans ce pays pour qu'il soit devenu nécessaire de rappeler des évidences pareilles. Mais qu'est-ce qui se passe ? Comment se fait-il qu'une femme en arrive à ne rien faire face au massacre programmé de son bébé d'un mois par le père, par crainte de voir le père s'en aller si elle le dénonce ? Mais enfin, si cet homme est capable de battre son bébé parce qu'il pleure, alors que n'est-il capable de faire à sa femme si elle la le malheur de lui dire "non" pour une chose ou une autre ? Elle va aussi rester sagement près de lui quand il la battra, juste par peur qu'il s'en aille ? Mais ça ne va pas ???
Et puis, il y a autre chose. Si on est "différents" aujourd'hui, alors on est inégaux. Donc discriminés. Eh oui. C'est le second glissement sémantique qu'on peut observer de nos jours. C'est pour ça que le lobby LGBT a fait très fort. En quelques années, il a réussi à faire accréditer l'idée que s'il y avait différence (d'orientation sexuelle dans ce cas, mais c'est vrai pour beaucoup d'autres choses) et qu'il n'y a pas les "mêmes droits" pour tous, alors il y a discrimination... Et le fait de dire quelque chose qui ne va pas dans le même sens équivaut à discriminer les personnes différentes (et devient donc un délit). Youpi !

Sur l'expérimentation ABCD de l'égalité, maintenant. Oui, l'expérimentation est terminée. Mais non, nous ne sommes pas "sauvés" pour autant (ou plutôt nos enfants ne sont pas sauvés). Parce que maintenant, les outils ayant été testés, c'est sur toute la France qu'ils vont être mis en place (dixit Mme Vallaud-Belkacem herself). Alors oui, ma cousine directrice d'école primaire va encore me dire que je me fais du mouron pour rien, qu'aucun enseignant sain d'esprit n'ira apprendre aux enfants la masturbation. Soit. Heureusement d'ailleurs. Parce que ça voudrait dire que les enseignants sont complètement dingues eux aussi. Mais ma cousine directrice d'école n'a pour le coup pas répondu à ma question : que fera-t-elle lorsque Benoît Hamon, son ministre de tutelle, lui imposera un certain nombre de choses qui heurteront sa moralité ? Est-ce qu'elle suivra les directives de son ministre "parce que j'obéis à la loi" ou bien saura-t-elle discerner ce qu'il convient de faire et ce qu'il faut jeter aux orties pour le bien des enfants dont elle a la charge 24 heures par semaine ?

En fait, en écrivant, je me rends compte que la question qui me préoccupe, ce n'est pas tant d'apprendre aux enfants qu'ils sont égaux en droits (parce que ça, je l'ai moi-même appris à l'école, hein. D'ailleurs, il me semble que l'égalité filles-garçons, ça fait partie des enseignements obligatoires à l'école depuis 1989. Donc j'ai dû en entendre parler, étant donné que j'ai passé mon bac en 1993). Non, les filles et les garçons sont égaux en droits, ça, il n'y a pas de doute, on le sait depuis longtemps, d'ailleurs, quand ça a été rendu obligatoire, c'était la même année que le bicentenaire de la Révolution Française, qui a sacré notre pays "Patrie des Droits de l'Homme" et qui a inscrit dans le marbre la devise républicaine "Liberté, Égalité, Fraternité", même si pour l'égalité hommes-femmes au niveau du droit de vote, par exemple, il a fallu attendre un certain nombre d'années pour que ça soit au point. Mais alors pourquoi cette histoire d'égalité filles-garçons me fait-elle bondir ? 
Peut-être justement parce qu'elle n'a pas lieu d'être ? Peut-être parce que ça devrait être tellement évident et ancré dans les cervelles que ça ne devrait pas avoir besoin d'un plan national d'enseignement ? 
Oui. Sauf si, derrière ce vocable "éducation à l'égalité filles-garçons", il y a autre chose qu'une simple question d'égalité des droits. Sauf si, derrière, le mot "égalité" souffre lui aussi de la même confusion que dans notre société, où il veut dire, finalement, "identique", "pareil", "même", et où, justement, la différence fondamentale entre la fille et le garçon est niée.

Alors ma cousine directrice d'école primaire me dit qu'il ne s'agit que d'apprendre aux filles qu'elles peuvent faire les mêmes métiers que les garçons, et inversement, qu'il n'y a pas de honte pour un garçon de vouloir être maîtresse ou danseur étoile. Ben oui. On en est là. Sauf que quand même, Najat Vallaud-Belkacem, elle a par ailleurs "pondu" la réforme du congé parental qui réduit de 6 mois le congé parental si le père ne prend pas ces fameux six mois. Sous prétexte que les femmes sont trop éloignées du marché du travail si elles restent à la maison pendant trois ans. Et que donc, sous-entendu, deux ans et demi, ça va tout changer pour elles ? C'est oublier, encore et toujours, que si ce sont les femmes qui prennent le congé parental, il y a pour une bonne part celles qui le font parce qu'elles gagnent moins bien leur vie que leur mari et d'autre part celles qui le font parce que ça leur plaît de s'occuper de leurs enfants. Et parfois, les deux raisons se cumulent joyeusement. Le jour où tout le monde (je dis bien tout le monde, de l'ouvrier au PDG, hommes ou femmes) gagneront la même chose chaque mois, alors la question du choix de congé parental ne se posera plus, parce que le père et la mère pourront prendre indifféremment ce congé sans aucune conséquence sur le budget familial (parce que, mais ça a peut-être échappé à la ministre, même durant le congé parental, les banques continuent à réclamer les traites du prêt pour la maison, l'électricité reste à payer tous les mois, de même que le gaz ou le loyer pour ceux qui sont locataires de leur logement). Alors il faudrait peut-être voir les choses de manière réaliste : cette réforme va nécessairement accoucher d'une souris (sauf pour le budget de la CAF, bien entendu) : peu, très peu d'hommes peuvent se permettre de quitter leur travail pendant six mois. Sauf, bien entendu, si ce congé était rémunéré non pas 380€ (le reste étant soumis à conditions) mais à la hauteur du salaire perdu ou, au moins, un prix décent. Là, peut-être que les pères partageraient davantage ce congé parental avec leur femme. Mais bon, l'objectif de cette réforme, là, même s'il est caché, est clair : il s'agit d'économiser, ni plus ni moins. Parce que le "plan" prévoit 25% des hommes en congé parental pour au moins six mois, pas plus, ce qui veut dire que 75% des congés parentaux seront réduits, ça va faire faire de sérieuses économies à la CAF, ça, Madame la Ministre ! Bien joué ! J'ai donc plutôt l'impression que le gros, gros enjeu, c'est de virer les femmes de chez elles et de les obliger à aller au taf plutôt que de s'occuper des enfants.

Plusieurs raisons à cela :
1- Une femme au travail, ça renforce l'idée que les femmes et les hommes sont "pareils" et donc interchangeables. 
2- Que deviennent les enfants pendant ce temps-là ? Ils sont confiés aux crèches et aux assistantes maternelles. Et comme il n'y a pas assez de places en crèche ni chez les assistantes maternelles, eh bien l'éducation nationale a la solution : accueillir les enfants dès deux ans ! Youpi ! En plus, là, c'est gratuit !
3- Confiés aux crèches et aux écoles dès deux ans, les enfants seront éduqués dans l'idée qu'une fille et un garçon c'est la même chose. Et donc qu'ils sont interchangeables. Plus de différences entre eux ! Ou comment formater les enfants à l'idéologie délirante du PS et des lobbys LGBT.
4- Ah oui, il y a un bénéfice économique évident : comme les femmes seront obligées d'aller travailler, il n'y aura plus personne pour s'occuper des tâches ménagères. Du coup, les couples seront dans l'obligation d'embaucher femmes de ménages, lingères et autres domestiques. Ça va créer de l'emploi et donc réduire le chômage en France ! Re-Youpi ! (ah en fait non, ça, c'est juste pour les quelques personnes qui auront un super niveau de vie et donc les moyens d'embaucher, parce que pour les autres (et pour les femmes seules en particulier), la galère continuera au quotidien).
5- Une fois les femmes et les hommes devenus "identiques" (et non pas égaux puisqu'ils le sont déjà), eh bien les femmes n'auront plus besoin des hommes. Parce que l'un des objectifs du lobby LGBT, c'est quand même d'aller jusqu'au bout de la loi sur le Mariage pour tous : accorder la PMA aux couples de femmes, et la GPA aux couples d'hommes. On va donc droit vers une société où les femmes seront maîtresses à bord ! Dictature des femmes ? Rhôô !!! Amélie, c'est pas bien, ça ! Non, ce n'est pas bien de penser de telles choses ! Comme si le but des féministes était l'éradication des hommes ! Ben non, on sait bien que les féministes aiment les hommes, qu'elles les apprécient à leur juste valeur ! [et en me relisant, je me rends compte que je vais droit vers l'amalgame féministe/LGBT. Tiens, ces deux "courants" auraient-ils des intérêts convergents ? Pourtant, ce n'est pas vraiment la même chose, si ? Je dis ça, je dis rien, moi.]

C'est marrant, parce que justement, le dernier discours féministe que j'ai entendu, c'était un appel à la "grève de l'utérus" (franchement, j'ai bien rigolé. Parce que du coup, si les féministes n'ont plus d'enfants, si elles arrêtent de se reproduire et donc de transmettre leurs idées, eh bien ça va sacrément simplifier les choses dans une ou deux générations). Mais paradoxalement, ces mêmes femmes (féministes, lesbiennes et autres) sont les premières à demander l'ouverture de la PMA aux couples de femmes (à leur crédit, certaines associations lesbiennes sont opposées à la prostitution et à la GPA au motif que leur corps n'est pas à vendre. Ouf, il y en a donc quelques-unes qui gardent un certain respect d'elles-mêmes, ça fait plaisir) . Et puis, il y a derrière, aussi, la question des utérus artificiels. Le grand rêve des féministes, je suppose : affranchir la femme de la grossesse. Lui permettre d'être mère sans avoir à accoucher. Comme par l'adoption, finalement, sauf que ce serait quand même son matériel génétique à elle. Les hommes deviendraient donc simples pourvoyeurs de gênes.

(là, je vois bien une société gouvernée entièrement par les femmes, type Amazones, où les hommes sont mis au secret et sélectionnés pour leur patrimoine génétique. Utilisés afin de féconder les ovules des femmes. Et les embryons sélectionnés en fonction de leur patrimoine génétique. Des filles pour assurer la pérennité de la société, quelques garçons pour assurer le renouvellement des générations, mais pas trop pour qu'ils ne puissent pas se rebeller contre la dictature féminine. Mais bien sûr, je suis aussi écrivain, et ça, ça pourrait être une nouvelle idée de roman).

Allez, je sens que je pars dans un véritable délire et que je ne vais pas me faire des amis encore une fois. Je vais donc arrêter là, d'autant plus qu'il est bon, parfois, de revenir aux réalités : mes enfants ont faim et il est temps que je m'occupe de leur préparer le déjeuner...

lundi 4 août 2014

De mon temps...

Je viens de finir la lecture des Affamés et j'avoue qu'après ça, j'ai besoin d'écrire. De poser les idées qui viennent en vrac dans mon cerveau fatigué (je me couche plutôt tard en ce moment) et de tenter d'y mettre un peu d'ordre.

J'ai eu le sentiment, à la fin de ma lecture, d'avoir vieilli d'un coup. Ou plutôt de m'être rendu compte que j'avais vieilli. Ou encore que je vivais sur une planète différente de celle qui est décrite dans ce livre. J'ai 39 ans. Pas encore le double de l'âge de Léa, mais, quand même, 17 ans nous séparent. C'est-à-dire plus que ce qui sépare Léa de ma fille aînée, qui va fêter ses 12 ans.
Dans ma tête, j'ai aussi 22 ans. À 22 ans, j'étais étudiante. J'étais bénévole dans une association d'aide aux personnes âgées et handicapées. Je décidais sur un coup de tête (ou presque) de partir en mode Road Trip pour 15 jours en Irlande avec une copine, sac au dos, violon et guitare en bandoulière. Je passais une nuit entière à enregistrer des chants cathos chez un copain pour préparer les JMJ de Paris et j'apprenais, ahurie, que dans les universités anglaises et américaines, ainsi que dans certaines universités et IUT technologiques français, les étudiants correspondaient entre eux par ordinateurs. Les téléphones portables coûtaient tellement cher que seuls les fils de médecins ou d'avocats en avaient un. La correspondance par ordinateur n'a pris pour moi le nom d'e-mail qu'un an plus tard quand, au cours de ma dernière année d'études, nous avons appris à apprivoiser un peu Internet (et que j'ai donc découvert un univers nouveau, inconnu, attirant, addictif aussi).

Léa et moi avons donc grandi dans le même pays, mais avec des réalités quotidiennes totalement différentes. Mais je m'interroge quand même. Est-ce réellement et uniquement une question de génération ? 
Je viens de passer trois semaines un peu étranges pour le commun des mortels mais extraordinaires, avec des rencontres variées, multiples et passionnantes. Notamment les deux premières semaines, du 6 au 20 juillet, où j'ai vécu au rythme de la mission paroissiale, mission d'évangélisation dans les 9 villages que compte notre communauté de paroisses, tout en accueillant à la maison deux de mes neveux, athées. Cette évangélisation était assurée par des jeunes gens (filles et garçons) âgés de 19 à 32 ans. À peu près le même âge que Léa, donc (au moins pour la majorité d'entre eux, celui de 32 ans faisant figure d'exception dans le groupe). Les jeunes que j'ai rencontrés venaient de différents (Bénin, France, Roumanie, Autriche, Lituanie, Suisse) et semblaient plutôt bien dans leurs baskets. Ils avaient l'air aussi bien dans leur temps et leur époque, malgré certaines difficultés rencontrées durant leurs vies et qu'ils ont pu partager avec nous durant les repas ou lors d'échanges impromptus.

Après la lecture des Affamés, je me suis demandé ce qui différencie les jeunes en général de ceux que je côtoie, et en particulier de ces neuf jeunes missionnaires. Et la réponse est immédiatement venue : la Foi.

Petit aparté avant de continuer : jusqu'à présent, à chaque fois que mon mari et moi constations des dérapages, des choses ou des événements qui se sont passés et qui nous semblent incompréhensibles et que nous y cherchions une raison, mon mari avait une seule explication : "Il n'y a plus la foi". "Elle déprime parce qu'elle n'a pas la Foi", "Ils divorcent parce qu'ils n'ont pas la Foi", "Les églises sont vides parce qu'il n'y a plus la Foi" (alors ça, pour le coup, c'est on ne peut plus vrai !), "Il y a des meurtres, la drogue, l'alcoolisme, la guerre, la GPA ou le "Mariage pour tous"... parce qu'il n'y a plus la Foi." On pourrait multiplier les exemples. Pendant longtemps, des années, cette mono-explication m'a hérissé le poil. Tout mettre sur le dos du manque de foi me semblait exagéré parce que les contre-exemples existent aussi : telle personne athée est généreuse et accueillante, tel jeune homme s'engage dans l'humanitaire, fait preuve d'altruisme, de don de soi... Pour moi, la bonté, la générosité, le sens du service, voire du sacrifice, étaient inhérents à la personne et la foi donnait à ceux qui y adhéraient un sens capable d'être un vrai moteur dans leur vie.
Jusqu'à ce que je comprenne qu'en réalité, je prenais les choses à l'envers. Pourquoi les personnes non-croyantes sont-elles capables de générosité, d'empathie, d'esprit de service, d'altruisme... ? Parce que Dieu, même si le monde pense qu'Il n'existe pas, a créé l'homme à son image et à sa ressemblance, donc capable d'aimer. Mais ce n'est pas la seule raison, sans doute. Prenons le cas d'une famille où tous les enfants ont tous reçu de leurs parents la même éducation, dans la foi catholique. Aujourd'hui, les enfants ont tous pris des chemins différents dans le domaine de la foi, l'un d'eux étant par exemple allé jusqu'à renier totalement cette foi reçue de ses parents. Pour autant, c'est un homme capable d'empathie, d'attention à l'autre et notamment à ceux qui souffrent. Faut-il voir dans ces qualités les "restes" humains de son éducation religieuse, expurgée de toute notion de divinité ? Sans doute, avec en plus une part peut-être importante liée à son caractère et à sa personnalité. Si ce n'était qu'une question d'éducation, alors des personnes qui n'ont rien reçu comme éducation religieuse (et il y en a toujours eu) ne seraient pas capables de ça. Et je sais bien que ce n'est pas vrai, la générosité, l'empathie et l'altruisme se rencontrant partout dans le monde, de même que l'égoïsme, l'avarice, le mépris ou le crime...
Qu'en est-il de ses enfants ? Par leur éducation, ils n'ont reçu que les valeurs "humaines" transmises par leurs parents. Mais par leur appartenance à une famille où toutes les nuances de la foi sont présentes, ils ont appris le respect de l'autre, la tolérance. De fait, ce sont maintenant des adultes ouverts, qui ont beaucoup d'amis et une vie riche tournée vers les autres.
Seulement la différence, c'est que pour ceux qui croient en Dieu, il y a "quelque chose" après la mort, il y a la vie éternelle. Cela n'a l'air de rien, comme ça. Et surtout, ça semble inutile à la vie quotidienne, de savoir ce qu'on deviendra après la mort. Mais quand on croit que la vie ne s'arrête pas à la mort du corps physique et qu'on comprend que la vie éternelle est une question de choix (1- l'amour de Dieu et le bonheur pour toujours ou 2- le rejet de Dieu et  la souffrance pour toujours), alors la vie terrestre commence à avoir du sens, une direction, un but. Et ça change absolument toute la perception de la vie, de soi, des autres et du monde.

Sans préjuger de la personnalité des gens, de leur caractère, je me dis qu'il y a chez les adultes d'aujourd'hui une part de valeurs qui sont donc issues de l'éducation qu'ils ont reçue, mais aussi et peut-être avant tout de la culture du pays dans lequel ils vivent. La France, "patrie des Droits de l'homme", c'est quelque chose qui a encore aujourd'hui du sens, y compris pour les non-croyants. Et si la France est justement le pays des Droits de l'homme, n'est-ce pas aussi en raison du fait qu'elle est la "Fille aînée de l’Église" ? Notre pays, depuis Clovis au moins, est une terre chrétienne, une terre dont les racines sont certes païennes (les Celtes, les Romains...) mais où plus de 1500 ans d'histoire ont façonné les mentalités des habitants et la culture du pays. Et cette histoire catholique a imprégné aussi bien la terre que les mentalités de ceux qui y vivent, obligeant sans cesse nos dirigeants, malgré leur actuelle volonté affichée de la nier ou de l'anéantir, à en tenir compte, souvent contre leur gré donc.
C'est peut-être en partie ce qui explique la fronde face à la loi Taubira. Plus d'un million huit cent mille personnes dans la rue ! Certains y ont vu uniquement des nazis, réactionnaires, fascistes, intégristes religieux... 1,8 millions de catholiques intégristes en France ? Ouah !!! Non. Soyons sérieux. La plupart n'étaient "que" des croyants "normaux", c'est-à-dire occasionnels au mieux, puisque le nombre de catholiques pratiquants est ridiculement faible au regard du nombre de ceux qui affichent leur foi catholique. (64% de catholiques en France, mais seulement 4,5% de pratiquants réguliers, soit 43% de catholiques qui vont à la messe le dimanche en 2010) (1). Quant aux Juifs et aux Protestants, s'ils étaient aussi pour une part présents dans les manifestations, ils sont bien moins nombreux dans la population que les catholiques... Tout cela fait donc penser que, fondamentalement, les valeurs chrétiennes de la France sont bien ancrées et peuvent expliquer les comportements et engagements des adultes.
Mais il ne faut pas non plus se leurrer : le travail de destruction massive de la foi, et du catholicisme en particulier, engagé depuis la Révolution Française, a abouti à une déchristianisation massive de notre pays. Si l'on ajoute à cela la mondialisation, l'immigration de masse et les progrès des technologies de la communication, on se retrouve avec un pays où la transmission des valeurs communes (le fondement judéo-chrétien de notre pays et de notre culture) se trouve perturbée par les apports des autres cultures.

Fin de l'aparté, donc. Une question de foi. Il n'y a plus la foi. Ce constat est partiellement faux, d'ailleurs puisque quand on cherche, on finit par trouver des foyers bien ancrés dans la foi, des jeunes qui s'y engagent dans la joie (il n'y a qu'à voir les succès d'un certain nombre d'écoles d'évangélisation ou de prière, ou encore de Philanthropos, par exemple... D'accord, c'est en Suisse, mais nombre de jeunes croyants Français y font une partie de leurs études). Il n'en demeure pas moins vrai que ces croyants sont ultra-minoritaires en France.
Pour peu qu'ils soient nés dans des familles où les parents n'avaient eux-mêmes pas reçu la foi, les jeunes qui ont aujourd'hui 25 ans n'ont plus comme horizon qu'un individualisme forcené, sans le secours de la foi. Et la solitude pour compagne...
Que vont devenir ces jeunes ? Quels adultes vont-ils être ? Qu'apprendront-ils à leurs enfants ? Que leur transmettront-ils ?

La dernière phrase du livre de Léa Frédeval résume parfaitement l'état d'esprit d'au moins une partie de la jeunesse de notre pays : 
Agis pour toi et personne d'autre parce que n'oublie jamais une chose : la seule personne avec qui tu vivras toute ta vie, c'est toi. (2)
Certes, il s'agit de la vision d'une jeune fille qui décrit son quotidien, sa vie d'étudiante et de jeune à Paris. Sans doute est-ce différent en Province ? Mais quand on voit les faits divers...
D'un côté, il y a ces jeunes en quête d'absolu et d'idéal qui vont chercher dans l'Islam, le Djihad et l'intégrisme religieux le cadre et la structuration qui leur font défaut.
De l'autre, on a ces jeunes parents d'une vingtaine d'années qui ont posté une photo de leur nourrisson d'un mois sur Facebook, nourrisson battu par son père depuis sa naissance en raison de ses cris et non défendu par sa mère par peur de voir le père la quitter... (3)
Il y a de quoi déprimer, quand on voit qu'une partie des jeunes a vraiment perdu tout repère.
Heureusement que je suis croyante. Dieu m'a révélé son amour pour moi et Il m'a exercée à "voir" les signes de sa présence quotidienne dans ma vie (voir ici et par exemple, ou encore ). Et certains de ces signes sont, justement, incarnés par les jeunes. Les Veilleurs, bien sûr, et plus récemment, les jeunes missionnaires qui sont venus deux semaines dans notre paroisse. Ce sont, pour moi, des raisons, certes faibles mais solides malgré tout, d'espérer.

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1- source : http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/01/24/qui-sont-les-catholiques-de-france_4354161_3224.html
2- p. 190.
3- Pour info : j'ai appris la semaine dernière une chose qui m'a vraiment étonnée : l’Église catholique reconnaît la légitimité de la séparation d'un couple dans trois cas : l'humiliation de la personne (ce qui inclut le harcèlement moral, sexuel, par exemple, de l'un des membres du couple par l'autre), le fait de s'en prendre aux enfants (dans l'exemple cité plus haut, le fait que le père batte l'enfant suffit à reconnaître la légitimité pour la mère de quitter le père, selon l’Église. Le fait qu'elle ne l'ait pas fait pour qu'il ne s'en aille pas pose quand même une sérieuse question : son couple est-il donc plus important que la vie de l'enfant qu'elle vient de mettre au monde ? Que sera-t-elle donc prête à accepter pour que son compagnon reste auprès d'elle ? Le viol ? la violence physique ? Morale ? Et après, on s'étonne qu'un nombre impressionnant de femmes meurent sous les coups de leurs conjoints ?) et la spoliation des biens (qui rendent la relation caduque parce que bâtie sur l'appât du gain, et non sur l'amour).