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complexe, éclectique, et forcément fait d'un peu de tout.

lundi 4 août 2014

De mon temps...

Je viens de finir la lecture des Affamés et j'avoue qu'après ça, j'ai besoin d'écrire. De poser les idées qui viennent en vrac dans mon cerveau fatigué (je me couche plutôt tard en ce moment) et de tenter d'y mettre un peu d'ordre.

J'ai eu le sentiment, à la fin de ma lecture, d'avoir vieilli d'un coup. Ou plutôt de m'être rendu compte que j'avais vieilli. Ou encore que je vivais sur une planète différente de celle qui est décrite dans ce livre. J'ai 39 ans. Pas encore le double de l'âge de Léa, mais, quand même, 17 ans nous séparent. C'est-à-dire plus que ce qui sépare Léa de ma fille aînée, qui va fêter ses 12 ans.
Dans ma tête, j'ai aussi 22 ans. À 22 ans, j'étais étudiante. J'étais bénévole dans une association d'aide aux personnes âgées et handicapées. Je décidais sur un coup de tête (ou presque) de partir en mode Road Trip pour 15 jours en Irlande avec une copine, sac au dos, violon et guitare en bandoulière. Je passais une nuit entière à enregistrer des chants cathos chez un copain pour préparer les JMJ de Paris et j'apprenais, ahurie, que dans les universités anglaises et américaines, ainsi que dans certaines universités et IUT technologiques français, les étudiants correspondaient entre eux par ordinateurs. Les téléphones portables coûtaient tellement cher que seuls les fils de médecins ou d'avocats en avaient un. La correspondance par ordinateur n'a pris pour moi le nom d'e-mail qu'un an plus tard quand, au cours de ma dernière année d'études, nous avons appris à apprivoiser un peu Internet (et que j'ai donc découvert un univers nouveau, inconnu, attirant, addictif aussi).

Léa et moi avons donc grandi dans le même pays, mais avec des réalités quotidiennes totalement différentes. Mais je m'interroge quand même. Est-ce réellement et uniquement une question de génération ? 
Je viens de passer trois semaines un peu étranges pour le commun des mortels mais extraordinaires, avec des rencontres variées, multiples et passionnantes. Notamment les deux premières semaines, du 6 au 20 juillet, où j'ai vécu au rythme de la mission paroissiale, mission d'évangélisation dans les 9 villages que compte notre communauté de paroisses, tout en accueillant à la maison deux de mes neveux, athées. Cette évangélisation était assurée par des jeunes gens (filles et garçons) âgés de 19 à 32 ans. À peu près le même âge que Léa, donc (au moins pour la majorité d'entre eux, celui de 32 ans faisant figure d'exception dans le groupe). Les jeunes que j'ai rencontrés venaient de différents (Bénin, France, Roumanie, Autriche, Lituanie, Suisse) et semblaient plutôt bien dans leurs baskets. Ils avaient l'air aussi bien dans leur temps et leur époque, malgré certaines difficultés rencontrées durant leurs vies et qu'ils ont pu partager avec nous durant les repas ou lors d'échanges impromptus.

Après la lecture des Affamés, je me suis demandé ce qui différencie les jeunes en général de ceux que je côtoie, et en particulier de ces neuf jeunes missionnaires. Et la réponse est immédiatement venue : la Foi.

Petit aparté avant de continuer : jusqu'à présent, à chaque fois que mon mari et moi constations des dérapages, des choses ou des événements qui se sont passés et qui nous semblent incompréhensibles et que nous y cherchions une raison, mon mari avait une seule explication : "Il n'y a plus la foi". "Elle déprime parce qu'elle n'a pas la Foi", "Ils divorcent parce qu'ils n'ont pas la Foi", "Les églises sont vides parce qu'il n'y a plus la Foi" (alors ça, pour le coup, c'est on ne peut plus vrai !), "Il y a des meurtres, la drogue, l'alcoolisme, la guerre, la GPA ou le "Mariage pour tous"... parce qu'il n'y a plus la Foi." On pourrait multiplier les exemples. Pendant longtemps, des années, cette mono-explication m'a hérissé le poil. Tout mettre sur le dos du manque de foi me semblait exagéré parce que les contre-exemples existent aussi : telle personne athée est généreuse et accueillante, tel jeune homme s'engage dans l'humanitaire, fait preuve d'altruisme, de don de soi... Pour moi, la bonté, la générosité, le sens du service, voire du sacrifice, étaient inhérents à la personne et la foi donnait à ceux qui y adhéraient un sens capable d'être un vrai moteur dans leur vie.
Jusqu'à ce que je comprenne qu'en réalité, je prenais les choses à l'envers. Pourquoi les personnes non-croyantes sont-elles capables de générosité, d'empathie, d'esprit de service, d'altruisme... ? Parce que Dieu, même si le monde pense qu'Il n'existe pas, a créé l'homme à son image et à sa ressemblance, donc capable d'aimer. Mais ce n'est pas la seule raison, sans doute. Prenons le cas d'une famille où tous les enfants ont tous reçu de leurs parents la même éducation, dans la foi catholique. Aujourd'hui, les enfants ont tous pris des chemins différents dans le domaine de la foi, l'un d'eux étant par exemple allé jusqu'à renier totalement cette foi reçue de ses parents. Pour autant, c'est un homme capable d'empathie, d'attention à l'autre et notamment à ceux qui souffrent. Faut-il voir dans ces qualités les "restes" humains de son éducation religieuse, expurgée de toute notion de divinité ? Sans doute, avec en plus une part peut-être importante liée à son caractère et à sa personnalité. Si ce n'était qu'une question d'éducation, alors des personnes qui n'ont rien reçu comme éducation religieuse (et il y en a toujours eu) ne seraient pas capables de ça. Et je sais bien que ce n'est pas vrai, la générosité, l'empathie et l'altruisme se rencontrant partout dans le monde, de même que l'égoïsme, l'avarice, le mépris ou le crime...
Qu'en est-il de ses enfants ? Par leur éducation, ils n'ont reçu que les valeurs "humaines" transmises par leurs parents. Mais par leur appartenance à une famille où toutes les nuances de la foi sont présentes, ils ont appris le respect de l'autre, la tolérance. De fait, ce sont maintenant des adultes ouverts, qui ont beaucoup d'amis et une vie riche tournée vers les autres.
Seulement la différence, c'est que pour ceux qui croient en Dieu, il y a "quelque chose" après la mort, il y a la vie éternelle. Cela n'a l'air de rien, comme ça. Et surtout, ça semble inutile à la vie quotidienne, de savoir ce qu'on deviendra après la mort. Mais quand on croit que la vie ne s'arrête pas à la mort du corps physique et qu'on comprend que la vie éternelle est une question de choix (1- l'amour de Dieu et le bonheur pour toujours ou 2- le rejet de Dieu et  la souffrance pour toujours), alors la vie terrestre commence à avoir du sens, une direction, un but. Et ça change absolument toute la perception de la vie, de soi, des autres et du monde.

Sans préjuger de la personnalité des gens, de leur caractère, je me dis qu'il y a chez les adultes d'aujourd'hui une part de valeurs qui sont donc issues de l'éducation qu'ils ont reçue, mais aussi et peut-être avant tout de la culture du pays dans lequel ils vivent. La France, "patrie des Droits de l'homme", c'est quelque chose qui a encore aujourd'hui du sens, y compris pour les non-croyants. Et si la France est justement le pays des Droits de l'homme, n'est-ce pas aussi en raison du fait qu'elle est la "Fille aînée de l’Église" ? Notre pays, depuis Clovis au moins, est une terre chrétienne, une terre dont les racines sont certes païennes (les Celtes, les Romains...) mais où plus de 1500 ans d'histoire ont façonné les mentalités des habitants et la culture du pays. Et cette histoire catholique a imprégné aussi bien la terre que les mentalités de ceux qui y vivent, obligeant sans cesse nos dirigeants, malgré leur actuelle volonté affichée de la nier ou de l'anéantir, à en tenir compte, souvent contre leur gré donc.
C'est peut-être en partie ce qui explique la fronde face à la loi Taubira. Plus d'un million huit cent mille personnes dans la rue ! Certains y ont vu uniquement des nazis, réactionnaires, fascistes, intégristes religieux... 1,8 millions de catholiques intégristes en France ? Ouah !!! Non. Soyons sérieux. La plupart n'étaient "que" des croyants "normaux", c'est-à-dire occasionnels au mieux, puisque le nombre de catholiques pratiquants est ridiculement faible au regard du nombre de ceux qui affichent leur foi catholique. (64% de catholiques en France, mais seulement 4,5% de pratiquants réguliers, soit 43% de catholiques qui vont à la messe le dimanche en 2010) (1). Quant aux Juifs et aux Protestants, s'ils étaient aussi pour une part présents dans les manifestations, ils sont bien moins nombreux dans la population que les catholiques... Tout cela fait donc penser que, fondamentalement, les valeurs chrétiennes de la France sont bien ancrées et peuvent expliquer les comportements et engagements des adultes.
Mais il ne faut pas non plus se leurrer : le travail de destruction massive de la foi, et du catholicisme en particulier, engagé depuis la Révolution Française, a abouti à une déchristianisation massive de notre pays. Si l'on ajoute à cela la mondialisation, l'immigration de masse et les progrès des technologies de la communication, on se retrouve avec un pays où la transmission des valeurs communes (le fondement judéo-chrétien de notre pays et de notre culture) se trouve perturbée par les apports des autres cultures.

Fin de l'aparté, donc. Une question de foi. Il n'y a plus la foi. Ce constat est partiellement faux, d'ailleurs puisque quand on cherche, on finit par trouver des foyers bien ancrés dans la foi, des jeunes qui s'y engagent dans la joie (il n'y a qu'à voir les succès d'un certain nombre d'écoles d'évangélisation ou de prière, ou encore de Philanthropos, par exemple... D'accord, c'est en Suisse, mais nombre de jeunes croyants Français y font une partie de leurs études). Il n'en demeure pas moins vrai que ces croyants sont ultra-minoritaires en France.
Pour peu qu'ils soient nés dans des familles où les parents n'avaient eux-mêmes pas reçu la foi, les jeunes qui ont aujourd'hui 25 ans n'ont plus comme horizon qu'un individualisme forcené, sans le secours de la foi. Et la solitude pour compagne...
Que vont devenir ces jeunes ? Quels adultes vont-ils être ? Qu'apprendront-ils à leurs enfants ? Que leur transmettront-ils ?

La dernière phrase du livre de Léa Frédeval résume parfaitement l'état d'esprit d'au moins une partie de la jeunesse de notre pays : 
Agis pour toi et personne d'autre parce que n'oublie jamais une chose : la seule personne avec qui tu vivras toute ta vie, c'est toi. (2)
Certes, il s'agit de la vision d'une jeune fille qui décrit son quotidien, sa vie d'étudiante et de jeune à Paris. Sans doute est-ce différent en Province ? Mais quand on voit les faits divers...
D'un côté, il y a ces jeunes en quête d'absolu et d'idéal qui vont chercher dans l'Islam, le Djihad et l'intégrisme religieux le cadre et la structuration qui leur font défaut.
De l'autre, on a ces jeunes parents d'une vingtaine d'années qui ont posté une photo de leur nourrisson d'un mois sur Facebook, nourrisson battu par son père depuis sa naissance en raison de ses cris et non défendu par sa mère par peur de voir le père la quitter... (3)
Il y a de quoi déprimer, quand on voit qu'une partie des jeunes a vraiment perdu tout repère.
Heureusement que je suis croyante. Dieu m'a révélé son amour pour moi et Il m'a exercée à "voir" les signes de sa présence quotidienne dans ma vie (voir ici et par exemple, ou encore ). Et certains de ces signes sont, justement, incarnés par les jeunes. Les Veilleurs, bien sûr, et plus récemment, les jeunes missionnaires qui sont venus deux semaines dans notre paroisse. Ce sont, pour moi, des raisons, certes faibles mais solides malgré tout, d'espérer.

__________
1- source : http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/01/24/qui-sont-les-catholiques-de-france_4354161_3224.html
2- p. 190.
3- Pour info : j'ai appris la semaine dernière une chose qui m'a vraiment étonnée : l’Église catholique reconnaît la légitimité de la séparation d'un couple dans trois cas : l'humiliation de la personne (ce qui inclut le harcèlement moral, sexuel, par exemple, de l'un des membres du couple par l'autre), le fait de s'en prendre aux enfants (dans l'exemple cité plus haut, le fait que le père batte l'enfant suffit à reconnaître la légitimité pour la mère de quitter le père, selon l’Église. Le fait qu'elle ne l'ait pas fait pour qu'il ne s'en aille pas pose quand même une sérieuse question : son couple est-il donc plus important que la vie de l'enfant qu'elle vient de mettre au monde ? Que sera-t-elle donc prête à accepter pour que son compagnon reste auprès d'elle ? Le viol ? la violence physique ? Morale ? Et après, on s'étonne qu'un nombre impressionnant de femmes meurent sous les coups de leurs conjoints ?) et la spoliation des biens (qui rendent la relation caduque parce que bâtie sur l'appât du gain, et non sur l'amour).

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