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jeudi 31 juillet 2014

Mariage... encore. Mais pas que.

Quelques petites réflexions qui me sont venues ce soir, en faisant du repassage.
Notre semaine à Rosheim (voir billet précédent) a été très riche en enseignements sur le mariage, sur le corps, sur la conception de l'homme, les enfants, et même, ô, surprise, sur les "devoirs d'état".
C'est quoi, cette bête-là ?

Eh bien voilà. Mes devoirs d'état, c'est par exemple m'assurer que mes enfants ont de quoi manger, se vêtir, se chauffer, aller à l'école. Par exemple, quand je fais du repassage, comme ce soir, je remplis l'un de mes devoirs d'état. Et quand je remplis ce devoir, si je le fais avec joie, même si ce n'est pas foncièrement épanouissant, je me sanctifie, je sanctifie mon couple et je sanctifie l’Église, qui est l’Épouse du Christ, puisque je suis membre de ce corps qui est l’Église... en gros, si j'ai bien tout compris des enseignements, en repassant le linge de mes enfants, de mon mari, non seulement je leur fais du bien, mais je fais aussi du bien à l’Église dans son ensemble parce que l'un de ses membres (moi-même en l'occurrence), fait quelque chose pour d'autres, en l'occurrence pour ses enfants et son mari. Et ce gratuitement, dans la joie, sans aucune contrepartie en retour. Parce qu'il ne faut pas se leurrer : malgré mon insistance à dire et à répéter aux enfants qu'ils font partie de cette famille tout comme moi, ils ne sont pas spécialement enthousiastes quand il s'agit de débarrasser la table, de mettre le couvert ou de ranger le couloir ou la bibliothèque qu'ils ont passablement investi pour leurs jeux... Donc, de contrepartie, il n'y a point. Donc mon "sacrifice" (parce que quiconque me connaît sait que j'ai toujours eu beaucoup de mal à accepter de repasser du linge) ne sert pas à rien : il m'apprend l'humilité, le don de soi, la gratuité, et donc, je l'espère, il me sanctifie en ce sens qu'il me rapproche de ce que le Christ demande à chacun d'entre nous : "Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés". En réalité, de cet amour, je suis loin, très loin, parce que le Christ, lui, a tant aimé le monde qu'il a donné sa vie pour nous sauver. Je n'en suis pas là, mais par ces petits sacrifices que constituent le repassage, la préparation des repas, l'ingratitude de certaines tâches, j'espère m'approcher de cet amour du prochain en offrant ces tâches au Seigneur.

Alors là aussi, il me faut entrer quelque peu plus avant dans les détails. C'est quoi, "offrir" ? Offrir, c'est donner gratuitement. Un cadeau, par exemple. Ça, ça va, je comprends, je vois très bien ce que ça peut être. Mais la foi catholique demande d'offrir en sacrifice, d'offrir la souffrance... et là, j'ai déjà un peu plus de mal. Offrir, à qui ? La réponse vient immédiatement dans la bouche de mon mari, quand je lui pose la question : "A Jésus, à Dieu". Ah. Et comment on fait ça ? Comment je peux "offrir" quelque chose qui est immatériel ? Et pourquoi, par exemple, offrir une grande tristesse ou une immense révolte suite à un événement douloureux, à Celui qui a déjà tout souffert pour nous ? Pourquoi rajouter encore un fardeau supplémentaire à Celui qui a déjà tant souffert et tout donné ?
Vaste question, dont je n'ai toujours pas bien compris les tenants et les aboutissants, et, surtout, le pourquoi. 
Jusqu'à un certain jour où j'ai naturellement "offert" une souffrance. Il y a deux ans, j'ai fait une fausse couche et j'en ai été très affectée. Passé le temps de l'incompréhension, de la douleur, il n'est resté que la tristesse, le manque, une sorte de vide. Ce bébé qui n'est pas né, même s'il est parti en tout début de grossesse, a laissé dans nos vies une place vacante. Il "manque" un enfant dans notre famille, c'est un fait, c'est comme ça. Un jour, donc, où je revivais en quelque sorte la douleur de la perte de cet enfant, je me suis mise devant le Seigneur, et je lui ai dit, quasiment textuellement : "Seigneur, je t'offre ce manque, cette tristesse qui m'habite, pour toutes les femmes qui vivent la même situation que moi. Pour toutes celles qui refusent la maternité, pour toutes celles aussi qui souffrent de ne pas avoir d'enfant."
Offrir, c'est donc, dans ce que j'en ai compris, comme participer avec empathie à la souffrance des autres. C'est un peu comme si ma douleur, ma tristesse, par ce geste, devenait fécond. Comme si cette douleur cessait d'être stérile pour enfanter une communion, une compréhension plus grande de la souffrance de celui ou de celle qui n'a pas, comme moi, le secours de l'amour de Dieu. Et qui donc se retrouve seul(e) face à cette souffrance et ne peut pas en sortir.

Donc, quand je repasse mon linge, celui des enfants et de mon mari, quand je prépare les repas et que ça me gave parce qu'une fois de plus, je ne sais pas ce que je vais bien pouvoir leur donner à manger et qu'il faut que je me creuse la cervelle, eh bien je me dis que je peux offrir ces petites questions, ces petits sacrifices ou prises de tête pour ceux et celles qui, par exemple, n'ont pas la chance que j'ai d'avoir à manger tous les jours, ou pour ceux qui sont contraints d'habiter dans la rue ou dans des hôtels miteux parce qu'ils n'ont plus de toit, et donc plus de table à repasser ni même, d'ailleurs, de machine à laver pour leur linge... Offrir, c'est donc me décentrer de moi-même, de mes petits soucis du quotidien, de ma vie de nantie (parce que je n'ai pas grand-chose, le congé parental, c'est pas Byzance, mais j'ai un toit et un frigo bien rempli, j'ai des cartons entiers de vêtements pour les enfants, et donc, nous ne manquons de rien !), et prier pour ceux qui n'ont pas ma chance, qui n'ont pas la santé, ou qui n'ont pas la foi, par exemple. Ça ne change rien à la situation de ces personnes, en tout cas, ce n'est pas parce que j'aurai pensé à eux que leur vie va changer du tout au tout et que, subitement, un toit leur sera proposé ou que le frigo va se remplir comme par magie. Il n'y a rien de magique là-dedans d'ailleurs. Mais en offrant ma souffrance, ma douleur ou mes tracas quotidiens, en offrant aussi les rires, les joies de la journée, j'entre en communion avec mes frères et sœurs et je prie plus facilement pour eux. Or la puissance de la prière est énorme. Quand un enfant demande avec insistance à ses parents quelque chose, en général, ses parents finissent, de guerre lasse, par lui accorder ce qu'il veut. Eh bien Dieu est exactement comme un père qui finit par donner ce qu'ils demandent à ceux qui demandent avec insistance. Donc, même si on a l'impression que ça ne sert à rien, eh bien je pense qu'il faut continuer à demander. Parce qu'un jour, quand ce sera le bon moment, la bonne personne va comme par hasard se retrouver au bon endroit et trouvera une solution pour la famille qui n'a plus de maison ou dont le frigo peine à nourrir tout le monde... De toute façon, il y a un bénéfice immédiat à offrir. C'est qu'en offrant, on ne pense plus à soi. Donc on devient moins égoïste, mais aussi plus humble. Et ça, c'est plutôt cool.

C'est marrant, hein, les chemins sur lesquels conduit le repassage ?

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